L’accession à la propriété, un parcours semé d’obstacles pour les classes moyennes

Image d'illustration. Clé logementADN
Devenir propriétaire est devenu un véritable défi pour les classes moyennes, confrontées à la hausse des prix de l’immobilier et à la difficulté d’accès au crédit. Leur rêve d’acquisition s’éloigne, malgré leur stabilité professionnelle.
Tl;dr
- L’accession à la propriété échappe aux classes moyennes.
- La politique du logement jugée inefficace et coûteuse.
- Des pistes existent, mais les alternatives peinent à convaincre.
Un rêve de propriété de plus en plus inaccessible
S’installer dans une grande ville ou une zone touristique semble désormais réservé à une minorité : telle est la conclusion d’une récente étude signée par l’Institut Montaigne. La question se pose : la propriété immobilière serait-elle devenue un privilège réservé aux plus de cinquante ans, aux familles aisées ou encore aux « héritiers » ? Selon le cercle de réflexion, la classe moyenne, définie comme située entre ceux gagnant moins de 1.400 euros et ceux dépassant 3.100 euros nets mensuels, se voit progressivement exclue du marché.
Les prix explosent, la frustration aussi
En vingt ans, les prix de l’immobilier ont grimpé de près de 88 %. Résultat : aujourd’hui, seulement 24 % des ménages détiennent 68 % des logements détenus par des particuliers. Une tendance confirmée par Corinne Jolly, présidente du site PAP (Particulier à Particulier), qui souligne que « les prix de l’immobilier sont devenus déconnectés des salaires », surtout dans des villes comme Paris. Cette situation alimente un sentiment d’injustice, en particulier parmi les jeunes générations confrontées au spectre du déclassement social.
Pour nombre d’observateurs, cette difficulté d’accès prend une dimension presque identitaire. L’attachement à la propriété reste fort en France : pour beaucoup, il symbolise la réussite et sert de bouclier contre les incertitudes économiques. Pourtant, l’offre actuelle – logements mal situés, peu rénovés ou trop chers – n’est pas adaptée à la demande dans les zones tendues.
L’action publique sous le feu des critiques
Les politiques menées n’apportent guère de réconfort. Malgré près de 40 milliards d’euros dépensés chaque année, dont plus de 15 milliards pour des aides personnelles au logement ou avantages fiscaux, la part du budget consacrée au logement a doublé depuis les années 1960. La politique du logement peine ainsi à accroître l’accès à la propriété ou même à favoriser la mobilité résidentielle. Selon Corinne Jolly, trop d’efforts sont concentrés sur le parc social devenu quasi inaccessible : « Le logement social est censé être un tremplin vers la propriété ; aujourd’hui, il ressemble davantage à un piège », constate-t-elle.
Pistes et solutions : entre innovation et scepticisme
Face au constat d’échec, l’Institut Montaigne avance plusieurs propositions pour relancer l’accession à la propriété :
- Soutenir une politique foncière stratégique, notamment via les établissements publics fonciers.
- Lutter contre la vacance afin d’inciter les propriétaires à remettre leurs biens sur le marché.
- Réhabiliter bureaux et locaux vides en logements habitables.
L’innovation séduit sur le papier – bail réel solidaire ou démembrement – mais laisse dubitative Corinne Jolly : « Cela devient incompréhensible pour beaucoup ; il faut simplifier et répondre aux vraies attentes des ménages ». Construire plus et adapter le parc existant semblent davantage faire consensus. Mais sans stabilité ni vision à long terme dans ce secteur déjà secoué par tant d’incertitudes, difficile d’imaginer une embellie rapide pour les classes moyennes désireuses de devenir propriétaires.