Italie : Sergio Mattarella élu président de la République
Sergio Mattarella a été élu samedi président de la République italienne.
En choisissant cet austère chrétien-démocrate de gauche qui s’est plusieurs fois heurté à Silvio Berlusconi, M. Renzi a resserré les rangs dans son Parti démocrate (centre gauche) et montré à l’ex-Cavaliere, son allié pour plusieurs réformes importantes, qu’il ne dépendait pas de lui.
M. Renzi démontre aussi sa capacité de direction. Son candidat a obtenu 665 voix des mêmes grands électeurs — 1.009 sénateurs, députés et représentants régionaux — qui n’étaient pas parvenus à s’entendre il y a deux ans.
Ils avaient dû obtenir que Giorgio Napolitano se représente, ce que l’ancien communiste avait accepté en prévenant qu’il ne resterait pas longtemps. A 89 ans, il a démissionné mi-janvier.
Alors que M. Renzi jubilait à la buvette de la Chambre des députés pendant le décompte et lançait sur son compte Twitter : « Bon travail, président Mattarella! Vive l’Italie ! », l’intéressé, reclus chez lui depuis plusieurs jours, est resté très sobre.
« Mes pensées vont avant tout aux difficultés et aux espoirs de nos concitoyens », s’est-il contenté de déclarer, esquissant un sourire, au cours d’une brève apparition lorsque son élection lui a été officiellement notifiée.
Sicilien catholique
Il doit prêter serment mardi à 10H00. Elu pour sept ans, le président italien a des pouvoirs restreints, mais il joue un rôle important d’arbitre en cas de crise politique.
Sicilien catholique, âgé de 73 ans, M. Mattarella est entré en politique après l’assassinat par la mafia de son frère, président de la région de Sicile en 1980. Il est passé à gauche dans les années 1990, jugeant que sa famille politique se rapprochait trop de M. Berlusconi.
L’ex-comédien Beppe Grillo, chef du Mouvement 5 étoiles (M5S) contestataire, a raillé la personnalité effacée et austère du nouveau chef de l’Etat : un président aux « 50 nuances de gris ».
L’élection de M. Mattarella est aussi un coup dur pour M. Berlusconi, prêt à soutenir un candidat du centre droit mais qui s’est considéré comme « trahi » par le choix de M. Renzi. Et sa consigne de voter blanc n’a été suivie que par 105 des 142 grands électeurs de son parti Forza Italia (droite).
Ces derniers mois, M. Renzi s’était pourtant plusieurs fois appuyé sur les voix de Forza Italia pour faire adopter des réformes rejetées par l’aile gauche du PD, à l’instar de la nouvelle loi électorale au Sénat la semaine dernière.
L’un des chefs de file de cette aile gauche du PD, Pierluigi Bersani, s’est d’ailleurs réjoui samedi : « C’est la démonstration que quand le PD est uni dans la cohésion, il trouve la bonne solution », a-t-il insisté.
« Le PD devait montrer qu’il était l’épine dorsale du système, et il l’a fait. Renzi a très bien joué », a ainsi estimé Ezio Mauro, directeur du journal La Repubblica.
Un coup dur pour Berlusconi
« Pour Berlusconi le coup est sûrement très dur. Son parti qui explose, qui n’accepte plus ses mots d’ordre. Il lui sera pourtant difficile d’abandonner le processus de réformes, c’est ce qui lui a permis de garder la tête hors de l’eau pendant cette année difficile », a-t-il ajouté.
Plusieurs membres de Forza Italia se sont prononcés en faveur d’une opposition beaucoup plus affirmée à l’encontre du gouvernement Renzi, et l’abandon de toute collaboration sur les réformes.
Alors que M. Berlusconi est assigné à résidence comme tous les week-ends dans sa villa d’Arcore près de Milan, l’un de ses proches, Giuliano Ferrara, a reconnu qu’il « sera(it) difficile de renouer un dialogue », mais, a-t-il ajouté, « il n’y a pas d’alternative au principe de réalité ».
Le chef du gouvernement « a derrière lui un parti à nouveau compact et face à lui un centre droit en miettes », a noté de son côté le journaliste politique Giancarlo Satalmassi en évoquant « un résultat sans précédent ».
« Et si l’économie repart (comme cela devrait être le cas…), les jeux sont faits : l’Italie a changé de visage », a-t-il ajouté.