En garde à vue, un suspect ne peut refuser de donner le code de déverrouillage de son smartphone
Le Conseil constitutionnel a tranché : poursuivre un gardé à vue qui refuserait de donner les codes d’accès de son téléphone est constitutionnel.
Dans une décision datant du 30 mars dernier, le Conseil constitutionnel a estimé que les personnes suspectées d’avoir commis un crime ou un délit ne peuvent pas refuser de donner accès à leur smartphone.
Les “Sages” tranchaient ainsi une Question prioritaire de constitutionnalité (QPC) soumise par l’avocat d’un homme qui est suspecté de trafic de stupéfiants. Il se trouve poursuivi pour ne pas avoir communiqué le code PIN de son appareil à l’occasion de sa garde à vue.
3 ans de prison, 270.000 euros d’amende
Ce que Me Karim Morand-Lahouazi, avocat au barreau de Paris contestait, c’était un article du Code pénal introduit en juin 2016, qui prévoit “de trois ans d’emprisonnement et de 270.000 euros d’amende” le fait de refuser de remettre aux autorités de justice la “convention secrète de déchiffrement d’un moyen de cryptologie susceptible d’avoir été utilisé pour préparer, faciliter ou commettre un crime ou un délit”. Autrement dit, de donner le code PIN du smartphone.
Le Conseil constitutionnel va donc plus loin que l’analyse de cet article de loi donnée par le représentant du premier Ministre lors de l’audience du 6 mars dernier : “la seule interprétation qui permette de rendre cet article conforme à la Constitution est de dire qu’elle exclut son application à des personnes suspectées d’avoir elles-mêmes commis une infraction. Cette interprétation est nécessaire […] pour préserver le droit de la personne suspectée à ne pas s’auto-incriminer”.
“Une atteinte au droit de garder le silence”
Dans les colonnes du Parisien, Karim Morand-Lahouazi réagit : “Malgré ce que me dit le conseil constitutionnel, je reste persuadé que c’est une atteinte au droit de garder le silence. La décision est si peu développée que je me dis qu’ils n’ont pas voulu se prononcer. La question intéressait tellement de monde que je suis très étonné de la réponse”. Or l’avocat rappelle que ce droit au silence, ainsi que celui à ne pas s’auto-incriminer, sont tous deux “consacrés par la Cour Européenne des droits de l’Homme”.
Au Monde, qui a relayé cette décision des “Sages”, Me Morand-Lahouazi indique que le code d’accès au téléphone “n’est pas un moyen de cryptologie”. Selon lui, ce terme s’applique aux fabricants de smartphones et non aux particuliers.