Allonger l’exploitation des centrales nucléaires : un choix économiquement avantageux

Image d'illustration. Centrale nucleaire energieADN
Selon des analyses récentes, maintenir en activité les centrales nucléaires françaises au-delà de leur durée initialement prévue pourrait générer des bénéfices économiques, en comparaison avec le coût du développement de nouvelles capacités de production d’électricité.
Tl;dr
- Prolonger le parc nucléaire reste plus compétitif que le neuf.
- Les coûts de maintenance d’EDF explosent depuis dix ans.
- Redresser la disponibilité exige des investissements massifs.
Des coûts en forte hausse pour un choix stratégique
Le débat autour de l’avenir du parc nucléaire français refait surface, cette fois sous la plume incisive de la Cour des comptes. L’institution met en lumière une réalité financière : entre 2014 et 2024, les dépenses annuelles consacrées à la maintenance par EDF ont bondi, atteignant désormais plus de 6 milliards d’euros, soit une hausse spectaculaire de 28 % par rapport à la décennie précédente. Cette envolée s’explique, selon les magistrats, autant par le vieillissement inéluctable des réacteurs – dont l’âge moyen coïncide aujourd’hui avec leur durée de vie initiale prévue, qu’aux exigences accrues en matière de sécurité après la catastrophe de Fukushima.
Prolonger ou reconstruire : un arbitrage délicat
Mais face à cet alourdissement des charges, la question centrale demeure : faut-il prolonger ou remplacer les installations ? Pour la Cour, le maintien des centrales jusqu’à 50, voire 60 ans reste « une option avantageuse », bien plus « compétitive » que la construction de nouveaux réacteurs. Les calculs sont sans appel : prolonger la durée de vie du parc coûterait environ 51 euros/MWh, à condition toutefois d’atteindre les prévisions de production et de maintenir des prix stables sur le marché de l’électricité. À titre de comparaison, le lancement du programme des six nouveaux EPR2 s’élèverait à près de 79,90 euros/MWh, selon les estimations récemment publiées.
Pénuries d’électricité et risque inévitable ?
Repousser l’échéance n’est cependant pas sans conséquences. La Cour alerte sur un point : si aucune prolongation n’était décidée au-delà de soixante ans pour une partie du parc actuel, la production nucléaire française pourrait être divisée par deux d’ici à vingt ans. Difficile alors d’envisager une transition énergétique maîtrisée sans appui sur cette ressource. Dans ce contexte incertain, certaines difficultés persistent malgré les efforts entrepris : on note notamment un allongement des arrêts pour maintenance et des crises ponctuelles comme celle liée à la corrosion sous contrainte ayant affecté près de la moitié des réacteurs en 2022.
L’enjeu de la disponibilité : un défi industriel et financier
Pour améliorer la situation, EDF a lancé dès 2019 son plan START 2025, censé optimiser l’organisation des arrêts programmés. Mais pour inverser durablement la tendance et remonter le taux de disponibilité (tombé à 74 % contre 80 % auparavant), il faudra engager des investissements massifs. À ce titre, voici les principaux chantiers identifiés par la Cour :
- Grand carénage : Un vaste programme industriel évalué à près de 100,8 milliards d’euros jusqu’en 2035.
- Suivi renforcé : Une vigilance accrue sur les coûts et délais s’impose selon les Sages.
La route vers une prolongation sereine du parc nucléaire semble donc semée d’embûches financières et techniques – mais demeure, pour l’heure, l’option jugée la plus rationnelle par les autorités indépendantes.