La facture des ruptures conventionnelles s’alourdit pour l’assurance chômage

Image d'illustration. Une lettre de démission ?ADN
Le montant total versé par l’assurance chômage au titre des ruptures conventionnelles ne cesse d’augmenter ces dernières années, en raison de la popularité croissante de ce dispositif pour mettre fin à un contrat de travail.
Tl;dr
- La rupture conventionnelle remplace massivement les démissions.
- Hausse des dépenses pour l’assurance chômage.
- Débat politique sur son avenir et ses dérives.
Un dispositif qui change la donne
Depuis son instauration en 2008, la rupture conventionnelle a bouleversé les modalités de séparation entre salariés et employeurs. Loin d’être anodine, cette procédure née d’un accord commun a su séduire de nombreux actifs, au point de redessiner le paysage du marché du travail français. Aujourd’hui, les regards se tournent vers les conclusions sans appel d’une récente étude publiée par l’Institut des politiques publiques (IPP), qui éclaire les conséquences de ce mécanisme sur le recours au chômage.
L’impact sur le marché du travail
L’analyse menée par l’IPP révèle un glissement notable : l’introduction de la rupture conventionnelle s’est traduite par une baisse de 19 % des démissions sur la période allant de 2003-2006 à 2012-2014. Autrement dit, pour beaucoup, ce mode de départ a remplacé la démission classique, ouvrant ainsi l’accès à des droits élargis à l’assurance chômage. Les chiffres avancés sont frappants : « 80 à 95 % des salariés ayant signé une rupture conventionnelle perçoivent des allocations chômage », précisent les chercheurs. De plus, « environ 80 % sont encore en recherche d’emploi vingt jours après leur rupture », signe que ce n’est pas un simple tremplin vers un autre poste, mais bel et bien un basculement vers le statut de chômeur indemnisé.
Polémiques et enjeux financiers croissants
La montée en puissance du dispositif ne va pas sans questionnement. Le ministre du Travail, Jean-Pierre Farandou, s’inquiète ouvertement des dérives possibles, évoquant ceux qui considèrent la rupture conventionnelle comme « un droit de tirage du chômage ». Il appelle désormais « les partenaires sociaux » à une réévaluation franche du système. Face à lui, la CFDT monte au créneau pour défendre l’esprit originel de la mesure. Comme le rappelle Patricia Ferrand, vice-présidente de l’Unédic, « la rupture conventionnelle n’a pas été créée pour soi-disant faire plaisir aux uns et aux autres », insistant sur le fait qu’elle repose avant tout sur un « commun accord ».
À y regarder de plus près, seuls 12 % des ruptures conventionnelles remplaceraient des licenciements pour motif personnel. En pratique, la majorité des situations conflictuelles échappent à toute issue amiable. Pourtant, leur coût demeure élevé : selon l’Unédic, elles représentent aujourd’hui le premier poste de dépense de l’assurance chômage (28 % du total), avec une proportion marquée chez les cadres.
L’avenir du dispositif en question
Face à ces constats chiffrés et aux réactions contrastées des acteurs sociaux et politiques, une question persiste : comment concilier souplesse pour les salariés et soutenabilité financière pour le régime d’assurance chômage ? La réponse dépendra sans doute des arbitrages attendus lors de la future renégociation de la convention prévue fin 2024.