Gestion du Covid-19 : comment la Russie se différencie-t-elle de la France et de la Chine ?
La pandémie ne frappe pas toutes les nations de manière égale. Un des derniers pays à entrer en période de confinement se trouve être la Russie.
Alors que son voisin chinois déploie ses efforts depuis plusieurs mois, ou que la France a lancé son confinement il y a quelques semaines, le gouvernement de Vladimir Poutine a plus de clefs en main que d’autres pour s’adapter à la situation exceptionnelle. Parfois pour s’en inspirer, parfois pour adopter des mesures plus souples.
Deuxième vague pour l’empire du Milieu
À chaque pays, ses solutions face au coronavirus. Certains n’ont pas encore atteint le pic de l’épidémie, alors que d’autres sont peut-être en train de subir une deuxième vague de contamination. C’est par exemple le cas du foyer du virus, la Chine où les bilans quotidiens comptabilisent de nouveau plus d’une centaine de cas. Ce n’était plus arrivé depuis le 5 mars, et au moment même où Wuhan s’ouvre de nouveau au monde, la ville de Harbin a au contraire imposé un confinement à ses quelques 11 millions d’habitants.
Actuellement, dans cette métropole située à quelques kilomètres de la frontière nord-coréenne, une seule personne par foyer est autorisée à quitter son domicile tous les trois jours pour faire des courses. De plus, le port du masque est obligatoire dans les rues (c’est également toujours le cas à Wuhan), de même que des contrôles de température très stricts. En outre, la principale particularité du confinement chinois est l’utilisation d’une application pour smartphones contenant la situation médicale et qui autorisent (ou non) les habitants à accéder à certains magasins ou d’utiliser les transports en commun.
En France
Dans l’Hexagone, Emmanuel Macron a annoncé un prolongement de la période de confinement au moins jusqu’au 11 mai.
De fait, il a fallu revoir l’attestation de déplacement dérogatoire, indispensable à toute sortie. À l’origine uniquement valable en version papier, une attestation numérique pour téléphone est possible depuis le 6 avril. Un code QR peut être généré et doit être conservé (via téléchargement ou capture d’écran) et pourra être scanné par les forces de l’ordre en cas de contrôle.
Pour ce qui est des mesures économiques, l’État français offre des protections inédites aux salariés. Depuis le 15 avril, il a été annoncé que 732.000 entreprises et donc 8,7 millions de salariés ont recours au dispositif d’activité partielle. L’État prend donc partiellement en charge des indemnités pour couvrir les salaires d’un tiers des employés du secteur privé en France. Si ces chiffres restent stables, cela signifie que le chômage partiel coûtera 24 milliards d’euros. Le site du Pôle emploi rappelle que la nature du contrat (CDI,CDD, interim) ou l’ancienneté n’ont aucune incidence sur l’éligibilité au chômage partiel. Idem pour les saisonniers ou les personnes actuellement en forfait jours. Une bonne nouvelle pour les salariés en situation précaire. L’exécutif a aussi annoncé une prime pour les fonctionnaires d’État (surveillants pénitentiaires, douaniers…). Le personnel de santé quant à lui, disposera d’une autre prime d’au moins 500 euros, et qui peut monter jusqu’à 1500 euros dans les zones les plus touchées par le Covid-19. Détail non négligeable : ces primes seront exemptes d’impôts.
L’échiquier russe
Le gouvernement russe avait d’abord commencé par instaurer une semaine de congés payés pour l’ensemble du pays du 30 mars au 3 avril. La période chômée a vite été étendue jusqu’au 30 avril inclus. Cependant, dans les faits, la période de confinement durera jusqu’au 11 mai inclus avec un début du déconfinement à partir du 12 mai.
Le président Poutine a également mis en place des vacances fiscales de six mois pour les entreprises et employés les plus touchés par la cessation d’activité. Cela inclut logiquement les entreprises relatives au tourisme (l’hôtellerie, les transports aériens, la restauration) mais aussi les milieux du sport, de la culture et les organismes d’enseignement non-gouvernementales. En outre, les entreprises offrant des services à la personne sont également concernées (les salons de coiffure ou de pressing par exemple). Vladimir Poutine avait, lors de ses deux allocutions, précisé qu’aucune entreprise ne serait autorisée à licencier des employés pour couvrir le manque à gagner dû à la cessation d’activité. Néanmoins, certaines ne s’en sont pourtant pas privées. C’est le cas de plusieurs restaurants ou des salles de sport, se retrouvant dans l’incapacité de payer leur loyer faute de clients, et qui ont dû choisir entre payer les salaires ou la location.
Un problème qui s’est ensuite transmis aux personnes désormais sans emploi qui peinent également à rembourser leurs prêts immobiliers ou leurs crédits. Si la situation est encore floue, et que le gouvernement russe, comme tant d’autres, s’adapte plus ou moins au jour le jour, nul doute qu’une fois la pandémie maîtrisée, de nombreux contentieux verront le jour.
En soutien à la mobilisation sans relâche du milieu hospitalier, les autorités ont décidé d’allouer une prime au personnel de santé impliqué dans la lutte contre le Covid-19. Cette prime peut aller de 350 à 1 000 euros et est bien sûr exempte d’impôts.
À l’instar de la Chine, les mesures mises en place en Russie ne sont pas globales. Chaque région décide indépendamment des autres la mise en confinement, mais surtout quelles entreprises sont jugées essentielles pour la région. Logique, la Russie est un pays tout simplement immense, et la propagation du virus varie naturellement d’une région à l’autre. Pour le moment, les mesures les plus drastiques concernent les zones du pays les plus atteintes par le covid-19, notamment à Moscou, le plus gros foyer d’infection, suivi de Saint-Pétersbourg. En conséquence, la liste des entreprises essentielles est vouée à changer quotidiennement.
De plus, d’autres entreprises qui ne figurent pas sur la liste en question peuvent être autorisées à continuer leur activité, à condition bien sûr de s’adapter aux besoins sanitaires actuels. Une entreprise comme Transmashholding, plus grande entreprise russe dans l’ingénierie des transports, présidée par Andrey Bokarev, ou encore la société de production de charbon, Kuzbassrazrezugol, appartenant au groupe UMMC présidé par Iskander Makhmudov, sont jugées d’importance systémique. Leurs salariés continuent ainsi de travailler tout en respectant les mesures de sécurité : distribution de masques, gel hydroalcoolique et thermométrie obligatoire, le respect de la distance de sécurité.
De telles mesures permettent ainsi de soutenir l’économie du pays et de maintenir les emplois d’un très grand nombre de personnes. Les entreprises d’importance systémiques sont au nombre de 1 100 aujourd’hui en Russie, on compte parmi elle de nombreux grands acteurs de l’économie et de l’industrie russes, tels que Gazprom d’Alexey Miller ou encore Rosneft d’Igor Setchine.
Russie, Chine, France, comment ces trois grandes nations sortiront-elles de cette crise et au prix de quels sacrifices ? Nul doute que la coopération internationale s’avère être plus indispensable que jamais.