Dijon : opacité autour d’un contrat de gestion de l’eau ?
C’est un véritable pavé dans la mare que la magazine « Le Point » vient de jeter dans les eaux apparemment saumâtres de la vie politique dijonnaise
En révélant les dessous de la bataille politico-judiciaire entre opposition et majorité et les deux géants français de la gestion déléguée de services essentiels, Veolia et Suez.
En effet, selon l’hebdomadaire paraissant le jeudi, l’ancien ministre de François Hollande, Président de la métropole dijonnaise et maire de la ville « doit se justifier d’avoir choisi Suez Eau France, plus cher de près de 20 millions d’euros que son concurrent direct Veolia. ». Les deux groupes ont à cet égard entamé une bataille judiciaire, Veolia ayant saisi en référé le tribunal administratif, estimant que les conditions d’attribution du marché auraient été changés, avec l’introduction « à la dernière minute d’une clause dans le cahier des charges qui faussait la règle du jeu » poursuit le Point. Or, si le recours introduit contre Suez a été rejeté ce lundi 16 Décembre comme le rapporte l’AFP, il semblerait que cela ne constitue que le premier round de ce qui s’annonce comme un véritable marathon judiciaire dans lequel s’engagent les deux groupes, Veolia ayant immédiatement fait part de son intention de saisir le tribunal administratif “afin de faire valoir (ses) droits”.
Un conflit d’intérêt larvé ?
Autre élément révélé par le magazine la semaine dernière, l’existence d’un possible conflit d’intérêt cristallisé autour de la personne de la « directrice des services chargés des réseaux à la métropole, qui a la gestion de l’assainissement et de l’eau dans son portefeuille ». Jusqu’en 2014, cette dernière était en effet la responsable de …Suez dans la ville avant d’être embauchée par François Rebsamen. Bien qu’ayant quitté l’entreprise il y a près de six ans, sa position actuelle qui en fait de fait la clé de voûte pour la passation de ce type de marché semble poser question.
A ce titre, l’opposition dijonnaise semble avoir flairé la « bonne affaire » et s’est engouffrée dans la brèche pour dénoncer le prix de l’eau à Dijon, qui flirterait avec les 4 euros, là où d’autres agglomérations de taille similaire se situent plutôt autour des 3 euros. Interrogé par Le Point, le leader de l’opposition-et candidat à la mairie- Emmanuel Bichot a exprimé son incompréhension devant la célérité avec laquelle le contrat avec Suez a été reconduit, alors même que ce dernier n’arrivait à échéance qu’en 2021. Il a en outre contesté le prix auquel le marché a été passé, mettant en avant son expertise en tant que conseiller à la cour des comptes.
Soupçons de favoritisme et méthaniseur de la discorde
De là à y voir une manœuvre de favoritisme en faveur de Suez, il n’y a qu’un pas que Le Point ne franchit pas, tout en pointant du doigt qu’ « À Dijon, on se demande pour quelle raison la métropole a pu choisir un prestataire 20 millions d’euros plus cher que son concurrent. Certes, le prix ne fait pas tout, mais Suez et Veolia ont un niveau de compétence et d’expérience comparable. ».
En outre, il y aurait un sujet de discorde autour de la mise en place d’un second méthaniseur – un outil qui transforme les déchets en combustible- qui pourrait faire doublon avec un autre dispositif du même type faisant l’objet d’un appel d’offres distinct. C’est vraisemblablement ce méthaniseur – rajouté dans le cahier des charges deux semaines avant le délai de clôture de l’appel d’offres- qui aurait contribué à obscurcir les conditions d’octroi du marché tout en aggravant la facture finale.