“Roi du Maroc, le règne secret” : un documentaire sensible sur Mohammed VI
Ce soir, France 3 diffuse le documentaire "Roi du Maroc, le règne secret" s'intéressant aux zones d'ombres entourant Mohammed VI. Le journaliste Jean-Louis Perez reconnaît que sa réalisation a été "un cauchemar".
En février 2015, deux journalistes français étaient interpellés à Rabat, au Maroc, alors qu’ils réalisaient un entretien dans les locaux de l’Association marocaine des droits de l’homme (AMDH). C’est l’un d’entre eux, Jean-Louis Perez, qui signe le documentaire allant être diffusé ce soir en seconde partie de soirée sur France 3, dans le cadre des “Docs interdits” : Roi du Maroc, le règne secret.
Auprès de nos confrères de lalibre.be, le journaliste explique que cette enquête menée sur Mohammed VI ne s’est pas faite sans mal, loin de là : “C’est un documentaire sensible. La réalisation a été un cauchemar ! J’ai été éjecté du pays par 40 policiers. Heureusement, j’ai pu sauver mes rushes. Les autorités marocaines ont un vrai problème avec la presse indépendante en général, et avec ce film en particulier. Je n’ai jamais connu autant de menaces d’attaque en justice, de pression. Pour nous discréditer, de très nombreux sites marocains ont réalisé des articles à charge, diffamatoires, en disant que ‘Docs interdits’ était devenu un ‘doc de choc’ réalisé par Catherine Graciet [NDLR : journaliste soupçonnée d’avoir voulu faire chanter Mohammed VI]. […] Le public pourra juger sur pièce, à la diffusion du film. Après, nous assumerons pleinement les critiques.”
Documentaire sur le roi du Maroc : “Nous assumerons pleinement les critiques”
Jean-Louis Perez explique comment lui est venue l’idée de tourner ce documentaire : “J’ai souvent passé mes vacances au Maroc. Quand on ne fait pas attention, tout va bien. Dans un récent voyage, j’ai réalisé un documentaire sur l’échec de la vente de Rafale par la France. Alors que je tournais sur un salon de l’aéronautique, que j’étais accrédité, je me retrouvais souvent au poste de police.
J’ai alors commencé à m’intéresser à la structure économique du pays, à l’emprise de la SNI, la holding royale marocaine, principal acteur économique du pays qui investit dans les secteurs de la banque, des assurances, de la grande distribution, des télécoms, de l’énergie… J’ai gratté et j’ai découvert un conflit d’intérêts.”
“Quand on ne fait pas attention, tout va bien”
Le journaliste reconnaît au passage ne pas avoir fait mention, dans son enquête, du rôle joué par les systèmes financiers occidentaux dans l’enrichissement du Royaume Chérifien. Comme justification, il invoque des conditions de réalisation déjà particulièrement compliquées : “Faire un constat sur la réalité du pays a déjà été tellement difficile ! Au début, l’angle était strictement économique et financier. A mesure que le film se fabriquait, j’ai été conduit à parler de la liberté de la presse, puis de la corruption au sein de l’armée, puis de Catherine Graciet.”
On sait Mohammed VI très réactif quand son royaume est la cible de critiques, comme en a récemment attestée sa réaction face à un rapport américain sur les Droits de l’Homme. Et si, à en croire François Hollande, la brouille entre le Maroc et la France est désormais de l’histoire ancienne, qui sait si cette enquête pourrait ne pas remettre le feu aux poudres.