Présidentielles au Pérou : le passé trouble du pays refait surface
Hier, a eu lieu au Pérou le premier tour des élections présidentielles. Trois candidats ont émergé pour un second tour qui s'annonce mouvementé.
Les résultats définitifs du premier tour des élections présidentielles au Pérou seront connus dans la nuit de lundi à mardi, mais déjà les premières estimations sont sorties. Keiko Fujimori, la favorite des sondages d’avant élections est sortie en tête avec une large avance. Deux candidats au coude à coude seront départagés par le décompte des bulletins. Ollanta Humala, l’actuel président à qui les péruviens reprochent un manque cruel d’activité ne s’est pas représenté.
Une seconde place incertaine
A 21 h, heure locale, les résultats portant sur 30 % des votes exprimés donnent Keiko Fujimori, la favorite des sondages, n’a pas fait démentir ces derniers avec un résultat aux alentours de 38,04 %. Insuffisant cependant pour l’emporter dès le premier tour. La seconde place, synonyme de second tour, est quant à elle, beaucoup plus incertaine.
Ces premiers résultats donnent Pedro Pablo Kuczynski, l’ancien banquier de Wall Street qui a renoncé à sa citoyenneté des Etats-Unis, second avec 25,48 % de votes, talonné par la candidate d’extrême gauche, proche du mouvement maoïste “sentier lumineux” qui avait créé la terreur dans le pays andin dans les années 80 et 90, avec 16,22% des votes. Les résultats des 30% des votes exprimés montrent une différence plus marquée entre Pedro Pablo Kuczynski et Verónika Mendoza qui étaient donnés au coude à coude au moment de la fermeture des bureaux de vote. Les autres candidats en lice ont tous obtenu moins de 8% des votes.
Un second tour sous haute tension
Le second tour pourrait être particulièrement agité. Si Pedro Pablo Kuczynski, comme les premiers résultats l’indiquent, parvient à se hisser au second tour, il devrait obtenir un large report des votes des candidats éliminés tant le rejet d’une large partie des péruviens pour Keiko Fujimori est important. Cependant, si Verónika Mendoza, la candidate d’extrême gauche passe, alors le dilemme sera terrible pour un grand nombre d’électeurs.
Keiko Fujimori représente à elle seule toute la corruption qui gangrène le pays et Verónika Mendoza renvoie la nation à ses heures les plus sombres de l’époque du terrorisme qui a ensanglanté le pays entre les années 1980 et la fin des années 90. Pedro Pablo Kuczynski, candidat ultra-libéral est lui aussi rejeté par un grand nombre d’électeur pour sa politique économique qui, pour beaucoup, reviendrait à vendre les richesses du pays aux étrangers.
Lorsque le passé trouble refait surface dans les élections
Si Keiko Fujimori se fait appeler simplement “Keiko” c’est que son nom de famille est particulièrement entaché. Alberto Fujimori, son père, fut président du Pérou entre 1990 et 2000. D’origine japonaise, il a géré le pays d’une main de fer, mis ses proches à des postes clé, créé un auto-coup d’état et profité de la corruption régnant dans le Pérou. Après avoir fui le pays, il fut extradé puis condamné à 25 ans de prison pour corruption et crimes contre l’humanité.
Des oncles et tantes de Keiko ont eux-aussi fui la justice du pays. Même si Keiko a promis de respecter les droits de l’homme, la démocratie et la liberté de la presse, elle ne cache pas que si elle est élue présidente, une de ses premières actions sera de gracier son père et le libérer de prison. Inacceptable pour un grand nombre de péruvien.
Verónika Mendoza représente quant à elle le retour du mouvement maoïste terroriste “sentier lumineux” qui avait mis le Pérou à feu et à sang durant les années 80 et 90.
Une élection dilemme pour beaucoup d’électeurs
Le second tour verrait vraisemblablement un report massif de voix vers Pedro Kuczynski dit “el gringo” afin de voter contre Keiko et la famille Fujimori. Cependant si Verónika Mendoza parvenait au second tour, le dilemme serait terrible et pourrait voir Keiko remporter les élections par rejet d’un retour de l’extrême gauche. Le second tour sera donc, pour beaucoup de péruviens, davantage un vote contre un candidat que pour un candidat.
Le Pérou est un des pays les plus pauvres d’Amérique du sud. La corruption est une pratique généralisée et bien qu’espérant du changement positif, beaucoup de péruviens sont résignés et n’attribuent aucune confiance dans les hommes politiques. Le second tour des élections aura lieu le 5 juin 2016. A noter qu’au Pérou, le vote est obligatoire et afin que les électeurs aient les idées claires, une loi dite “ley seca” interdit la vente et la consommation d’alcool la veille et le jour des élections.