Pourquoi bâiller est-il si communicatif ?
"Un bon bâilleur en fait bâiller 7" (ou 10), on connait tous cette expression mais comment se fait-il que ce soit si contagieux ?
Vous avez bâillé en lisant le titre ? Oui, une simple évocation peut suffire. Mais le phénomène est encore plus fréquent si l’on entend ou si l’on voit une personne bâiller face à nous ou dans notre proche entourage.
Mais comment se fait-il qu’un simple bâillement soit si contagieux ?
Un tournant en 2003
L’étude du bâillement a fait l’objet d’une avancée considérable dans ce que l’on espérait en comprendre en 2003, sous l’impulsion de deux chercheurs de l’université des technologies d’Helsinki en Finlande.
Grâce à une technique d’imagerie fonctionnelle, ils se sont aperçus que le simple fait de voir quelqu’un bâiller active une zone du cerveau localisée au niveau du sillon temporal supérieur. C’est ici que se trouvent les « neurones miroirs », qui ont été découverts en 1996 par des neurologues italiens.
Quel est leur rôle ? Ils doivent permettre le décodage de l’intention d’autrui. Situés dans la zone du cerveau gérant les émotions, ils constituent la base de l’empathie, qui est la capacité à s’identifier à autrui dans ce qu’il ressent.
Il ne s’agit pas d’imitation donc, car en l’espèce cela ne passe pas par la volonté de bâiller, et il y a un caractère automatique (ce qui est infiniment moins le cas dans le rire). Le cerveau va activer les zones de la mémoire, de l’émotion, et du lobe frontal qui s’occupe entre autres de l’anticipation.
Un lien avec le trouble du spectre autistique ?
À l’université de Stanford, en 2019, 64 enfants âgés de 6 à 12 ans ont été étudiés par des chercheurs. Parmi eux, 34 d’entre eux étaient atteints de troubles du spectre autistique.
Qu’ont découvert les chercheurs ? Que les enfants autistes bâillaient moins par mimétisme que les autres. Le taux d’ocytocine (hormone connue pour son rôle dans l’attachement entre autres) a été mesuré et chez certains enfants atteints de troubles du spectre autistique, il était plus faible. Ainsi, l’hormone de l’empathie pourrait être liée à la propension à être sensible au bâillement contagieux.
Les femmes y sont plus sensibles
Dans le même ordre d’idée, une étude menée par des chercheurs de l’Université de Pise (Italie) au milieu des années 2010 a démontré les femmes étaient plus susceptibles de succomber au besoin de bâiller en voyant un autre individu le faire.
Comment ? Ils ont observé pas moins de 4 000 bâillements (dans des lieux publics ou des bureaux) sans que les personnes sachent qu’elles étaient l’objet d’une telle observation. Connaissant les liens unissant les sujets, ils sont arrivés à ces conclusions :
- plus les personnes se connaissent, plus le bâillement contagieux se produit ;
- les femmes y sont plus sensibles.
Pour les chercheurs, l’empathie des femmes serait plus développée.