La maladie d’Alzheimer racontée dans un livre par une patiente
Dans "Mes pensées sont des papillons", la journaliste Jacqueline Remy couche sur papier le témoignage d'Eveleen Valadon, une septuagénaire atteinte de la maladie d'Alzheimer. Une manière finalement assez peu connue d'aborder le sujet.
Après avoir vécu six mois auprès d’Eveleen Valadon, femme de 79 ans atteinte de la maladie d’Alzheimer, la journaliste Jacqueline Remy a appris des choses qui n’auraient vraisemblablement pu lui être inculquées d’une autre manière. Mes pensées sont des papillons, paru le 6 septembre dernier aux éditions Kero, constitue un témoignage atypique.
Auprès de nos confrères de L’Obs, la journaliste raconte d’abord le point de départ de sa démarche : “J’avais un proche malade d’Alzheimer. Il était d’abord dans le déni, le sujet était tabou, on n’en parlait pas. Quand il est entré au stade où il ne pouvait plus en parler, je me suis aperçue que je ne savais pas grand-chose de ce qu’il avait pu vivre. Il était passé du silence à l’oubli. J’avais une vraie frustration. On parle beaucoup de la maladie d’Alzheimer, mais sait-on ce que vivent ces malades de l’intérieur ?”
Une journaliste “frustrée” face à un proche atteint d’Alzheimer
Jacqueline Remy ne souhaitait pas se rapprocher d’une personnalité connue, aussi a-t-elle jeté son dévolu sur Eveleen, “ancienne prof d’anglais, devenue peintre, divorcée, vivant seule”. Et la journaliste d’ajouter : “Quand je l’ai rencontrée, elle était diagnostiquée depuis quatre ans, elle était autonome, quelqu’un venait deux fois par jour pour l’aider. Elle avait très envie de faire ce livre, elle voulait dépasser les stéréotypes faux, méprisants, et humiliants attachées à cette maladie.”
Un livre pour faire changer les mentalités sur la maladie
Cette septuagénaire supportait ainsi assez mal que l’on considère les patients d’Alzheimer comme fous : “Elle voulait montrer qu’on pouvait avoir Alzheimer sans être ‘zinzin’, comme elle dit. La première fois qu’elle a acheté ses médicaments, elle a vu le mot ‘démence’ sur la boîte. Ça l’avait abattu. C’était vertigineux pour elle. Elle se répétait : ‘Je ne suis pas démente !’ Elle avait entendu aussi une émission qui parlait de l’agressivité des personnes atteintes de cette maladie, elle ne le supportait pas. L’Alzheimer trimbale une image négative. C’est une maladie honteuse qui ne se dit pas, qui se cache. La grande défense d’Eveleen était d’ailleurs de faire comme si elle n’était pas malade.”
Les entretiens n’ont pas été faciles à mener, Eveleen ayant même souhaité, à un moment donné, les arrêter en raison d’efforts d’apparence qui l’épuisaient considérablement. Aujourd’hui, Eveleen apparaît fatiguée et moins apte à se concentrer. Elle désire malgré tout parvenir à accepter cette autre personne qu’elle est devenue : “Elle ne se reconnaît pas dans la femme qu’elle est aujourd’hui, elle le vit comme un dédoublement. Elle dit qu’elle essaie d’adopter cette nouvelle Eveleen, de ne pas s’énerver contre elle, de ne pas lui en vouloir. Elle essaie de vivre bien avec cette personne qui n’est pas vraiment elle, peureuse, désorientée, angoissée.”