L’étonnante histoire derrière l’expression “froid de canard” et ses origines méconnues

Image d'illustration. Un canard solitaire sur un lac geléADN
L’expression familière « froid de canard » évoque des températures glaciales en hiver. Mais d’où vient cette formule imagée ? Son origine remonte à une pratique ancienne liée à la chasse et au comportement des canards par temps froid.
Tl;dr
- « Froid de canard » vient du jargon des chasseurs.
- L’expression s’est popularisée avec le temps.
- Rien à voir avec les canards et le froid.
Origine insolite d’une expression hivernale
Le retour du froid s’accompagne, chaque année, de son lot d’expressions savoureuses. Parmi elles, la fameuse : « il fait un froid de canard ». Curieusement, ce sont les canards qui se retrouvent à illustrer notre sensation de gel intense… alors même que ces palmipèdes ne sont pas réputés pour leur résistance au froid extrême.
Pourquoi donc cette association inattendue ? Pourquoi ne pas évoquer l’ours polaire ou le manchot, autrement plus adaptés à la météo glaciale ?
Une histoire de chasse et de migration
Pour comprendre l’origine de cette formule populaire, il faut plonger dans l’univers des chasseurs. Comme le révèle Delphine Gaston-Sloan dans son ouvrage L’Almanach des expressions françaises, petit inventaire insolite, édité chez Larousse, l’arrivée du froid sonnait autrefois comme une aubaine pour ces amateurs d’affût. C’est en effet lors des premiers frimas que les vols de canards sauvages migrateurs faisaient halte sur nos étangs et rivières – offrant ainsi aux chasseurs l’occasion idéale d’aller « prélever » quelques spécimens.
Ajoutons un élément peu connu : lorsque la température chute suffisamment bas pour geler les plans d’eau, les canards se voient forcés de quitter leur habitat naturel. Cette obligation de bouger les expose davantage aux tireurs embusqués. Ainsi, pour ces derniers, parler d’un « froid de canard » revenait à se réjouir du lancement officieux de la saison de chasse.
Un succès populaire… et quelques fausses pistes
Il n’est donc pas question ici d’une hypothétique affection des canards pour la neige, ni d’une quelconque endurance particulière à la bise hivernale. La tournure doit tout à sa sonorité efficace… et sans doute aussi au fait qu’elle s’avère bien plus percutante que « un froid d’ours polaire » ou « un froid de manchot ».
Certaines alternatives auraient pu émerger – on pense notamment à « un froid de cheval » –, mais force est d’admettre qu’aucune ne possède la même musicalité ni la même force imagée.
Pour résumer simplement :
- L’expression trouve sa source dans le vocabulaire cynégétique.
- Elle s’est imposée dans le langage courant grâce à son rythme accrocheur.
- Aucune relation directe entre canards et grand froid.
Détour par le verbe “cailler”
Enfin, une anecdote supplémentaire mérite d’être citée : si certains s’amusent à utiliser « ça caille », inutile de chercher ici une allusion palmipède. Ce verbe vient en réalité du registre scientifique ; il signifie littéralement « coaguler ». Autrement dit : « il fait si froid que le sang semble se figer dans les veines ». Une image certes moins bucolique… mais tout aussi saisissante !