Le retour de Gaston Lagaffe ne fait pas que des heureux
Gaston Lagaffe sera de retour dans un tome 22 en fin d'année, un retour qui fait grincer quelques dents.
Gaston Lagaffe est un personnage emblématique du monde de la bande dessinée. Célébrant cette année son trentenaire, les éditions Dupuis ont annoncé son retour il y a quelques jours dans un nouveau tome, le 22ᵉ, intitulé « Le retour de Lagaffe », dessiné par le Canadien Delaf. Un retour qui ne fait pas que des heureux, quand on sait que le Belge André Franquin, son créateur, ne souhaitait pas que son héros lui survive.
Gaston Lagaffe sera de retour dans un tome 22 en fin d’année
La directrice générale des éditions Dupuis ne s’en cachait d’ailleurs pas, au micro de franceinfo : « On y va au culot », commentait-elle. Mais pour Jean-Pierre Mercier, ancien conseiller scientifique à la Cité internationale de la bande dessinée et de l’image à Angoulême, commissaire de l’exposition Goscinny, « la vraie bonne question, c’est la créativité par rapport à des générations montantes. » Et d’ajouter : « Si on est un ‘amoureux’ de la série, on peut trouver dommage qu’on déflore une icône. »
Un retour qui fait grincer quelques dents
Au-delà de la seule aura de Lagaffe, l’on peut s’interroger du succès potentiel de ce futur Gaston face au manga, aujourd’hui très en vogue en France. Pour Jean-Pierre Mercier, « ces classiques existent, ils se vendent. On voit qu’effectivement Astérix continue avec de nouveaux dessinateurs. C’est comme au cinéma, ce sont des systèmes de franchises. La vraie bonne question, c’est la créativité par rapport à des générations montantes aujourd’hui. Et il est clair que la culture manga est très forte chez les moins de 40 ans. C’est entre un tiers et la moitié des ventes de bandes dessinées en France. Donc, la question qu’on peut se poser : est-ce que c’est en reprenant des personnages un peu anciens, en essayant de les relooker, de les lifter, de les rajeunir un peu pour les mettre à l’air du temps, qu’on peut réussir ? Je ne sais pas. Je n’ai pas la réponse. Des fois, cela peut marcher, Astérix en est la preuve, d’autres tentatives ont moins été couronnées de succès. »
À ce petit jeu du lifting, Tintin semble le dernier grand résistant, comme le note franceinfo. Et quand nos confrères demandent à Jean-Pierre Mercier si c’est une bonne ou une mauvaise chose, là encore, cela dépend du point de vue : « Ça dépend de quel point de vue on se place. Si on est un « amoureux » de la série, qu’on soit amoureux de Tintin, de Gaston ou d’Astérix, on peut trouver dommage qu’on déflore comme ça des icônes. Mais on sait bien, par exemple, que pour tous les classiques de la littérature, que ce soit Les trois mousquetaires ou Le comte de Monte-Cristo, je pense à Alexandre Dumas, en l’occurrence, il y a eu des films qui ont été plus ou moins loin du texte d’origine. Et là, c’est exactement la même chose. La vraie bonne question derrière tout ça, c’est : est-ce qu’il vaut mieux laisser un personnage dans sa période historique, qu’il devienne un classique, quitte à être « daté » ou est-ce qu’il faut essayer de le mettre dans l’air du temps ? […] En fait, cela dépend du choix de l’éditeur, des auteurs, des volontés des auteurs, en l’occurrence Hergé pour Tintin qui avait dit : « Non, il n’y aura pas de Tintin après moi ». Franquin l’avait dit aussi, sauf que légalement, cela a été moins bien « bordé ». »