Avions : c’est quoi, les carburants durables ?
À l'horizon 2050, les compagnies aériennes doivent atteindre "zéro émission nette de CO2". Mais comment comptent-elles s'y prendre ?
Pour fournir sa partir dans le combat contre le réchauffement climatique, les compagnies aériennes se sont engagées, à l’échelle globale, à atteindre “zéro émission nette de CO2” d’ici à l’année 2050.
Au niveau des émissions de dioxyde de carbone par voyageur et par km, l’aérien apparaît numéro 1 du classement des plus polluants. Ses émissions sont de l’ordre de 45 fois supérieures au TGV, et le secteur représentait en 2015 environ 11% des émissions de CO₂ de l’ensemble des moyens de transport, soit 1,5% des émissions totales de gaz à effet de serre. Dès lors comment parvenir à une émission nette nulle d’ici 2050 ?
La piste des carburants durables
Et l’équation, déjà pas simple au départ, tend à se compliquer davantage si l’on considère que les appareils moins consommateurs de kérosène, voire propulsés à l’énergie électrique ou à l’hydrogène, ne seront pas en capacité de conquérir les cieux avant 2035; et encore, pas pour les long-courriers, pour lesquels il faudra encore devoir patienter (si patienter était encore possible) des décennies.
Les carburants durables, c’est quoi ?
Une définition d’abord, ou plutôt deux pour tracer une frontière entre un carburant alternatif et l’autre durable. Ainsi, l’Organisation de l’aviation civile internationale (ICAO) définit comme carburant alternatif un carburant issu à partir de sources autres que le pétrole, à l’instar des huiles et graisses hydrogénées.
De son côté, l’Association du transport aérien international (IATA) voit dans un carburant réellement “durable” un carburant alternatif ne venant pas concurrencer la production d’eau et de nourriture, ou qui entraîne la dégradation des forêts, et qui devra s’avérer moins néfaste que le classique kérosène. D’accord, très bien, mais comment ces carburants SAF (de l’anglais “sustainable aviation fuels”) sont produits ? Par exemple, de déchets alimentaires ou agricoles, ou en faisant appel à la biomasse.
À 50% avec le kérosène
Comment les utiliser ? À ce jour, ils peuvent être mélangés à moitié avec le kérosène. Philippe Novelli, directeur des programmes propulsion aéronautique et environnement à l’Onera, le centre de recherche aérospatial français, indiquait au printemps 2021 à l’AFP que “Leur composition est proche de celle du kérosène mais pas strictement identique, car ils n’ont pas de molécules aromatiques”. Ainsi, pour en finir avec le kérosène, il faudra ajouter des aromatiques de synthèse, ou modifier les moteurs.
Au mois de mai dernier, Air France a effectué un vol Paris/Montréal avec 16% d’huiles de cuisson recyclées.
Quels sont les besoins en SAF ?
En 2019, ces carburants durables représentaient moins de 0,1% des 360 milliards de litres utilisés pour le secteur aérien. Quand les pays scandinaves ont réglementé une incorporation de 30% à l’horizon 2030, la France espère 5%.
Et ce n’est pas tout, pour évaluer le progrès qui reste encore à faire pour parvenir à l’objectif de neutralité en 2050… En effet, alors que 250 000 vols ont été effectués avec une part de carburants durables depuis le tout premier en 2008, les SAF ne sont disponibles en continu que dans certains aéroports à savoir Los Angeles, Oslo, Stockholm et Brisbane. Les besoins en SAF estimés à 2050 sont de l’ordre de 500 millions de tonnes. Et puis, comme l’expliquait Patrick Pouyanné, patron de de Total, le prix serait un frein non négligeable sans l’appui des pouvoirs publics : “Le jet fuel coûte 400 euros la tonne, le biocarburant coûte 1 500 euros. Sur un Paris-New York, si on met 1% de biocarburant dans un avion, cela va augmenter le prix du billet aller-retour de 5 dollars”. Un objectif qui reste donc, à l’heure actuelle, encore très ambitieux.