Nicolas Sarkozy : anti-terrorisme sur internet, est-ce applicable ?
Pour lutter contre le terrorisme sur internet, Nicolas Sarkozy a annoncé qu'il souhaitait mettre en place une loi visant à punir pénalement les personnes visitant des sites faisant l'apologie du terrorisme. Sans parler de la liberté individuelle, une telle loi est-elle techniquement possible ?
À peine l’affaire de Toulouse se termine-t-elle par la mort de Mohamed Merah que Nicolas Sarkozy propose une série de mesure visant à lutter contre le terrorisme. Surfer sur une vague de peur et se reposer sur l’émotion est une stratégie qu’empreinte tous les candidats dans cette affaire, mais M. Sarkozy n’est pas seulement candidat, il est aussi président. Parmi toutes ces mesures, il propose de sanctionner les internautes qui visitent des sites qui incitent au terrorisme. Dans un Tweet du compte officiel de l’Élysée, on peut voir : « Toute personne qui consultera des sites internet qui font l’apologie du terrorisme et de la violence sera punie pénalement ».
Déjà se pose la question de la liberté individuelle : en effet, pour punir les personnes qui se rendent sur ses sites, il faut surveiller les connexions. Or, cela implique de savoir précisément où vont les gens, soit en demandant à leur fournisseur d’accès internet, soit en les surveillant personnellement. Un mauvais point pour la liberté individuelle, impossible de filtrer les surveillances : tout sera analysé. Il est donc fort peu probable que le Conseil Constitutionnel accepte une telle loi.
Mais au-delà d’une simple question de loi, il y a celle de la capacité. En France, plus de la moitié des habitants vont sur internet, ce qui revient à plus de 30 millions. Est-il réellement possible de surveiller autant de monde ? La très controversée loi Hadopi contre le téléchargement ne parvient déjà pas à surveiller le piratage, alors les visites sur un site… Il faudrait engager plus de monde, beaucoup plus de monde, pour parvenir au final à « trouver » quelques terroristes qui de toute façon seront incapables de payer une amende pour rentabiliser tout cela.
Et d’ailleurs, pourquoi ne pas simplement supprimer les sites qui font l’apologie du terrorisme ? Cela demanderait moins de personnels non ? Déjà il existe déjà des unités chargées de surveiller ce genre de site, tout comme il en existe pour surveiller la pédophilie sur internet. Mais , d’où l’idée de surveiller ceux qui y vont et non pas de les supprimer. Et puis, une autre question se pose : à quel titre peut-on considérer qu’un site fait « l’apologie du terrorisme » ? Pour ne pas tomber dans le totalitarisme, il faudrait mettre en place une commission chargée d’analyser et de mettre en place des critères précis. Sauf que là encore, cela coûte de l’argent et du temps.
Non, cette loi n’est absolument pas applicable telle qu’elle a été énoncée. Si Nicolas Sarkozy est réélu, il ne pourra pas, financièrement et humainement, la mettre en place. Tout au plus créera-t-il un service qui fonctionnera comme Hadopi : mal et sans réellement répondre au problème.
Lutter contre le terrorisme est tout de même une bien noble cause, mais encore faut-il la traiter avec raison et non pas avec passion.