Journée mondiale sans Facebook : comment repérer une “cyberdépendance” ?
À l'occasion de la Journée mondiale sans Facebook, le psychiatre et chef du service d’addictologie de l’hôpital Sainte-Anne Xavier Laqueille donne notamment ses clés pour détecter une "cyberdépendance".
C’est une initiative parmi d’autres pour tester les utilisateurs concernés et leur faculté à se détacher de leurs actions effectuées à un rythme quasi-quotidien. La septième édition de la Journée mondiale sans Facebook se tient ainsi en ce mardi 28 février, avec l’objectif de se questionner sur la relation de l’être humain au réseau social.
À cette occasion, LCI s’est entretenu avec Xavier Laqueille, psychiatre et chef du service d’addictologie de l’hôpital Sainte-Anne (Paris). Quand on lui demande de définir une “cyberdépendance”, il explique que le facteur de la fréquence n’est pas pris en compte ici :
“Pour nous, tout ce qui est de l’ordre de l’addiction ou de la dépendance, et donc ici de la cyberdépendance, se définit par un critère de perte de contrôle, et non par un critère quantitatif. C’est-à-dire qu’il existe à la base une activité que l’on aime bien; le joueur aime jouer, le fumeur aime fumer, etc.; mais on considère que le sujet devient dépendant quand il y a une perte de maîtrise de lui-même, qui va se caractériser par l’abandon de certaines activités au profit du processus pathologique, par la réduction des intérêts… C’est cela qui va permettre le diagnostic, pas la quantité.”
“Cyberdépendance” : le danger d’une “perte de contrôle”
Et s’il fallait le rappeler, le psychiatre indique que la dépendance peut isoler et même se révéler comme la partie émergée de l’iceberg :
“Le sujet peut s’enfoncer dans un processus de plus en plus envahissant et comme dans toutes les pathologies addictives, ce qui est en dehors de l’addiction devient inintéressant. Le sujet se désocialise, son activité ainsi que sa vie psychique et sociale se réduisent. […] Quand un adolescent passe son temps sur internet, ne va plus en cours, ne dort pas la nuit, n’a que des amis sur le web et pas à l’extérieur, cela demande une vraie évaluation clinique. La dépendance est un symptôme qui doit être évalué pour déterminer si c’est une addiction pure ou si c’est une addiction avec une pathologie psychiatrique associée : une maladie dépressive, un trouble phobique sévère ou une pathologie mentale grave, du type schizophrénie.”
Un “sevrage” à joindre à une “stratégie de longue durée”
Comment Xavier Laquille perçoit-il ces stages de désintoxication digitale, ou même ces journées invitant à se détourner des réseaux sociaux ? Pour le médecin, il est important de soigner le contexte de telles démarches :
“Une pathologie addictive est une pathologie au long cours et, si un sevrage peut être utile, il demande un niveau de préparation important, justement pour travailler la motivation. Il faut que le sevrage s’accompagne d’une stratégie de longue durée, notamment pour prévenir les rechutes. Il y a toujours des fonctionnements d’opportunités, qui surfent sur les inquiétudes des uns et des autres, avec des propositions de solutions magiques. Mais ces propositions brutales ne sont pas efficaces si elles ne s’accompagnent pas de soins bien construits.”