Au Pérou, Maxima Acuna, la paysanne qui résiste à un géant minier
Maxima Acuna, une paysanne de l'altiplan péruvien refuse de vendre son terrain à une grande société minière.
Parce qu’elle refuse de céder face à une grande société minière, Maxima Acuna, une simple paysane de l’altiplano péruvien est devenue le symbole de la résistance à l’exploitation minière au Pérou. En effet, elle refuse de vendre le lopin de terre que réclame comme sien une puissante multinationale exploitant la plus grande mine d’or à ciel ouvert d’Amérique du Sud.
Dans cette nouvelle affaire de pot de terre contre pot de fer, Maxima Acuna de Chaupe et sa famille affrontent la compagnie minière Yanacocha – portée par l’Américain Newmont – engagée dans le projet de Conga, une extension d’une des plus grandes mines d’or à ciel ouvert du monde.
« Je peux démontrer que nous sommes propriétaires de ce terrain depuis 1994, tous mes papiers sont en règle« , affirme Maxima Acuna à l’AFP.
Elle vit avec son époux et quatre grands enfants à Tragadeogrande, sur les hauteurs de la commune de Sorocucho, dans la province de Celendin, près de Cajamarca, au nord du Pérou.
De son côté le géant minier, qui prévoit un investissement global de 4,8 milliards de dollars pour ce projet d’extraction d’or et de cuivre, fait face à l’opposition de la population locale et du gouvernement régional de gauche de Cajamarca, qui craint la disparition des ressources en eau de la région.
« Je n’ai rien vendu à Yanacocha, qu’ils me montrent les documents qui prouvent qu’ils possèdent le terrain et disent combien ils l’auraient payé, ils n’ont aucune preuve« , martèle pour sa part Maxima dans un entretien téléphonique avec l’AFP.
Agée de 48 ans, toujours coiffée du chapeau de paille à large bord traditionnel de Cajamarca, Maxima défend farouchement depuis quatre ans sa petite exploitation de 25 hectares à près de 4.000 mètres d’altitude.
« Quelle eau boirons-nous ? »
Depuis 2011, Yanacocha a dû suspendre son projet d’exploration minière qui implique que les lacs d’altitude doivent être vidés et remplacés par des réservoirs artificiels, au grand mécontentement des communautés avoisinantes.
« Mon terrain borde Yanacocha et possède plusieurs sources. Et cette eau nous la buvons, elle va à la communauté. Si je vends, quelle eau boirons-nous ? De quoi allons-nous vivre ?« , s’interroge Maxima, dont l’histoire a été relatée dans le monde entier par des ONG engagées dans la défense de l’environnement.
Pour sa part la compagnie Yanacocha assure avoir acheté le terrain à la communauté rurale de Sorochuco en 1996. Une procédure judiciaire a été lancée en 2011 pour définir les droits de propriété du terrain.
Récemment, au milieu de l’âpre bataille juridique l’opposant au géant minier, Maxima a été acquittée du délit d’usurpation dont elle avait été accusée par Yanacocha.
Maxima Acuna : « je n’ai pas à m’humilier ou à avoir peur »
Son avocate, Mirtha Vasquez, liée à Grufides, une ONG de défense de l’environnement, a interprété la décision judiciaire comme une victoire pour sa cliente et la reconnaissance de son droit de propriété. Mais pour la compagnie minière, l’affaire ne peut en rester là.
Aussi la semaine dernière, lorsque la famille Chaupe a décidé de construire une extension de sa maison, Yanacocha a démoli la construction, assistée par des forces de police recrutés par la compagnie minière, selon Maxima Acuna.
« J’ai construit à l’intérieur du périmètre de mes 25 hectares« , assure la paysanne. « Mais ils veulent me faire partir par la force, ils voient que je suis pauvre, que je ne sais pas lire, ils veulent m’enlever mes droits, mais cela me rend plus forte et je résiste parce que j’ai tous les documents et je n’ai pas à m’humilier ou à avoir peur« , ajoute-t-elle.
La semaine dernière, avec l’aide de son avocate, Maxima a répliqué en déposant une nouvelle plainte contre Yanacocha.
La situation de Maxima Acuna a mis à nouveau en évidence la multiplication des conflits sociaux au Pérou notamment entre communautés autochtones et compagnies d’extraction de ressources naturelles, principale richesse du pays.
Selon le Défenseur du peuple (médiateur), quelque 210 conflits sociaux ont été enregistrés au Pérou en janvier dernier, dont 140 portant sur la défense de l’environnement.