Une innovation Android à deux vitesses
Les possesseurs d'un téléphone portable équipé du système d'exploitation mobile de Google sont lents à adopter les dernières mises à jour, et les derniers chiffres témoignent d'une fragmentation grandissante du système.
Dans le monde hyper concurrentiel des OS mobiles, deux sociétés se partagent les plus grandes parts du gâteau, à savoir Apple et Google. Si les chiffres varient d’un pays à l’autre, leur système d’exploitation respectif, iOS (iPhone) et Android, se disputent tour à tour la première place du classement, qui se situe aux alentours des 30% de parts de marché. Loin devant les 10% de BlackBerry ou encore les 5 à 7% de Windows Phone.
Ces parts de marchés sont non seulement significatives quant aux succès des différents smartphones, mais elles sont également un argument de premier choix pour les développeurs, qui cherchent avant tout à monétiser leurs applications et leur sens de l’innovation. Ainsi, ceux-ci, ou les sociétés et startups pour lesquelles ils travaillent, favoriseront toujours la plateforme la plus porteuse, la plus populaire, la plus rentable en priorité.
Si pendant longtemps ils privilégiaient presque exclusivement l’iPhone, participant au passage au succès du téléphone Apple, Google Android est aujourd’hui devenu tout autant incontournable.
La dernière mouture Android, appelée Ice Cream Sandwich, vise à rendre le système d’exploitation open source de Google moins geeky, plus accessible pour les non-initiés, plus beau, plus simple d’utilisation. Les critiques sont quasi unanimes, ICS, ou Android 4.0, est une réussite, et la première version de l’OS Google a pouvoir rivaliser objectivement avec l’ergonomie sans faille de iOS, aujourd’hui dans sa cinquième version majeure. Problème : sorti il y a maintenant plus de deux mois, Ice Cream Sandwich n’est aujourd’hui présent que sur le Samsung Galaxy Nexus, réalisé en partenariat avec Google. Si les ventes de ce smartphone, lui aussi très bien accueilli par les spécialistes, sont plutôt encourageantes (environ 700 000 appareils vendus — sur un total de 200 millions d’appareils Android vendus à ce jour), sans être exceptionnelles (le Galaxy Note a par exemple fait mieux, avec un million d’unités vendues), le système d’exploitation Ice Cream Sandwich ne représente aujourd’hui que 0,6 % des différentes version d’Android entre les mains des consommateurs.
Plus significatif encore, plus de la moitié des utilisateurs Android restants (55%) sont encore équipés de Gingerbread (Android 2.3), sorti il y a maintenant un an. Un tiers des utilisateurs Android est encore sous Froyo (2.2), vieux de 20 mois déjà. Des chiffres inquiétants, qui transforment l’image des parts de marchés du secteur des smartphones, alors que les deux tiers des utilisateurs iPhone sont quant à eux passés à la dernière version, iOS 5. Des chiffres qui ne sont pas sans rappeler ceux du monde PC, où Windows XP est encore l’OS le plus populaire au monde, bien que suivi par deux mises à jour majeures (Vista et 7) et vieux de plus de dix ans.
Ce nouveau visage des statistiques avance qu’en termes d’équipement en dernière génération logicielle, Apple est en tête de peloton. Plus troublant encore, la dernière version d’Android serait moins populaire que la dernière version de Windows Phone, Mango, sortie en septembre 2011.
Acheter un nouveau téléphone plutôt que d’attendre la mise à jour
Alors certes, le très vendu Samsung Galaxy SII devrait très rapidement recevoir cette mise à jour, qui devrait faire gonfler les statistiques pour ICS. Les autres téléphones devraient suivre également, sans parler des futurs modèles, dont le succès est garanti. Mais le processus est lent. Il semblerait que les utilisateurs Android aient plus vite fait d’adopter la dernière version de leur OS préféré en achetant un nouvel appareil, plutôt qu’en attendant une mise à jour qui ne sera pas sûre d’arriver pour tout le monde.
En effet, la fragmentation d’Android, qui lui a notamment permis au départ d’envahir rapidement le marché (sa compatibilité avec de nombreux processeurs, nombreuses résolutions d’écran, nombreux opérateurs téléphoniques à travers le monde et nombreux constructeurs, tous friands de modifications et de customisation) pose un problème de plus en plus difficile à surmonter pour les consommateurs souhaitant rester à la pointe de la technologie, ou simplement pour avoir accès à leur application préférée.
Certains ne parlent déjà plus de développement pour Android, mais de développement “compatibles” avec Android. Les prochains mois seront donc déterminants quant à l’avenir d’Android. Si son succès est incontestable, Google devra néanmoins faire le ménage dans le capharnaüm qu’est aujourd’hui sa fragmentation. Dans le cas contraire, Android ne sera plus une plateforme au singulier, mais une multitude de plateformes qui se concurrenceront elles-mêmes.