Nigéria : l’horreur Boko Haram
Retour sur l’existence de la secte nigériane Boko Haram, qui ne tente plus de convaincre, mais sème la terreur dans le nord du pays.
Semaine sanglante au Nigéria. Le nord-est du pays, en proie aux constantes exactions de la secte islamiste Boko Haram, a enregistré mercredi dernier le pire massacre jamais perpétré par les extrémistes.
Samedi, une petite fille de 10 ans s’est également fait exploser dans un marché. Le bilan de ces trois jours de terreur se monte à plus de 2000 morts.
Destruction de 16 villages
Mercredi 7 janvier, les islamistes de Boko Haram ont entièrement détruit 16 villages, du nord-est du pays, berceau de leur implantation. Leurs attaques ont entraîné la mort de plus de 2000 personnes. 20 000 villageois auraient quant à eux réussi à prendre la fuite, principalement en direction du camp de réfugiés de Maiduguri, capitale de l’Etat de Borno, ou du Tchad voisin.
La ville de Baga, dont les islamistes avaient pris le contrôle le week-end précédent, aurait été rasée à près de 90%, d’après les témoignages des survivants.
Parmi eux, Yamaye Grema, un pêcheur de cette ville implantée sur la rive du lac Tchad, a expliqué à l’AFP l’horreur sans précédent des massacres. Après trois jours à rester caché entre deux murs, l’homme est parvenu à fuir sans se faire repérer : « Sur 5 km, je n’ai pas arrêté de marcher sur des cadavres, jusqu’à ce que j’arrive au village de Malaku Karauti, qui était également désert et brûlé ».
Le responsable administratif de l’Etat de Borno, Musa Bukar, a indiqué à l’AFP que les habitants de Baga et des villages voisins qui ont tenté de fuir en brousse ont été traqués et tués par des islamistes à moto. « Des corps gisent toujours dans la brousse, mais il n’est pas prudent d’aller les chercher pour les enterrer », a-t-il ajouté.
Samedi, l’armée nigériane en a appelé à l’aide internationale.
Une bombe sur une fillette de 10 ans
Le même jour, c’est une bombe fixée sur une petite fille de dix ans qui a explosé au cœur du marché de Maiduguri, provoquant la mort de 19 personnes, ainsi que 18 blessés.
Selon toute vraisemblance, la fillette ignorait qu’elle détenait une bombe, fixée à son corps.
Dimanche, deux autres femmes kamikazes se sont fait exploser sur un autre marché de Poliskum, faisant quatre morts et une vingtaine de blessés.
Histoire et objectifs
Le groupe islamiste, créé en 2002 par Mohamed Yusuf, est classé comme organisation terroriste par les Etats-Unis. Son nom intégral signifie « groupe islamiste pour la prédication et le djihad ».
Son objectif est de faire appliquer la charia sur le territoire nigérian. Il est actuellement implanté et particulièrement actif dans toute la zone nord-est du pays.
Depuis la mort de son fondateur, Boko Haram est dirigé par le fondamentaliste Abubakar Shekau. Ce dernier a fait de la secte d’alors un véritable mouvement insurrectionnel islamiste.
Relations avec Al Qaïda
Le groupe revendique une filiation avec l’islamisme salafiste des Talibans afghans. Malgré cela, les deux groupuscules semblent poursuivre des objectifs différents : alors qu’Al Qaïda en Afghanistan s’oppose et s’attaque aux intérêts occidentaux, Boko Haram concentre principalement son insurrection à l’encontre du gouvernement nigérian.
Pour autant, les deux groupes sont tous deux opposés à la modernité et aux valeurs occidentales, Boko Haram signifiant d’ailleurs « l’éducation occidentale est un pêché ».
Dans une vidéo qui date du mois de juillet dernier, Abubakar Shekau apporte son soutien à Abou Bakr Al-Baghdadi, calife de l’Etat Islamique, mais également à Ayman al Zaouahiri, émir d’Al Qaïda, et au Mollah Omar, chef des Talibans, ce qui peut paraître assez étrange, lorsqu’on sait la rivalité qui oppose –notamment en Syrie- l’Etat Islamique et Al-Qaïda.
Méthode
Boko Haram, plus que n’importe quelle organisation terroriste, utilise la propagation de la terreur comme principale arme de destruction.
Si les combats ont, des années durant, principalement été menés contre les Chrétiens, notamment par le biais d’attaques d’églises et de conversions forcées à l’Islam, depuis 2011, le groupe multiplie les attentats à l’encontre de lieux publics, et également contre les écoles et les lycées dispensant un enseignement selon eux trop proche des valeurs occidentales.
Ainsi, de nombreux rapts de jeunes filles, comme en avril dernier à Chibok, ont également été perpétrés ces dernières années. Depuis 2013, Boko Haram revendique également des enlèvements d’otages étrangers.
Lutte contre le groupe islamique
Selon plusieurs rapports publiés en 2014, Boko Haram disposerait d’environ 8000 combattants dans ses rangs. Un document du département de la sécurité intérieure des Etats-Unis indique que « cette structure laisse la possibilité de divisions et ne fournit pas de garantie, lorsque quelqu’un prétend parler au nom du groupe, qu’il représente l’ensemble des factions. »
La stratégie mise en place par l’armée nigériane, purement défensive, ressemble pourtant bel et bien à un échec. Boko Haram parait en effet pouvoir s’étendre depuis de nombreuses années sur de larges territoires au Nord du pays, sans rencontrer de réelle résistance.
Le président nigérian, Goodluck Jonathan, actuellement très contesté pour son absence de résultat dans cette lutte, avait clairement affiché, dès son arrivée aux affaires en 2011, vouloir entamer une politique de négociation avec les terroristes.