Le pluralisme des Anonymous éveille les craintes infondées de futures attaques
Le mouvement des Anonymous se voit prêter des intentions démesurées, affolant certains esprits au sujet d'une panne généralisée d'Internet le 31 mars et d'une attaque du réseau électrique américain.
Les Anonymous, auto proclamés “Final Boss of the Internet” forment une nébuleuse déstructurée force de mobilisation sans précédents, fédératrice et coercitive mais constellée de modes opératoires divergents. Entre groupes de discussions, manifestations virtuelles, mobilisations IRL dans la rue, attaque Ddos (saturation des serveurs), defacing (maquillage de sites), stalking et diffusion d’informations compromettantes, le mouvement Anonymous se conjugue en des formes plurielles de mobilisations pour la défense les libertés fondamentales du web : partage, liberté d’expression, neutralité du web et lulz.
Cette pluralité de cibles et modes opératoires peut conduire à une confusion des discours, brouillant les pistes d’une philosophie commune que les observateurs cherchent à saisir. Après les annonces d’attaque à l’encontre de réseaux sociaux, aussi improbables que contreproductives pour un mouvement qui utilise efficacement ces canaux de communications, des individus se revendiquant du courant Anonymous ont menacé de bloquer des serveurs racines DNS le 31 mars. Il s’agit d’une action prennant corps au sein de l’opération Global Blackout visant à engager une campagne massive de “protestation contre la SOPA, Wallstreet, les leaders irresponsables et banquiers bienaimés qui affament le monde“.
S’en prendre au DNS par Reflective DNS Amplification DDOS serait synonyme de paralysie du web . Les serveurs racines DNS seraient alors pris pour cible par un envoi massif de requêtes destinées à les saturer. Comme l’explique le communiqué de l’attaque : “personne ne pourra effectuer une recherche de nom de domaine […] n’importe qui entrant une URL obtiendra une page d’erreur“. Une telle opération, même si selon ses orchestrateurs elle ne “cherche pas à tuer Internet“, reste improbable ne serait-ce que pour deux raisons. D’une part les Anonymous ne sont pas une meute prête à mordre sa propre main nourricière, qui lui donne vie et pour laquelle ils luttent selon une certaine opinion de ce qu’elle devrait leur offrir . Et d’un point de vue bassement technique il est peu probable de réussir à faire tomber les 13 serveurs DNS composant l’infrastructure d’Internet. Tout au plus cela provoquera des perturbations ponctuelles au courant de la journée. Mais ne serait-ce que d’un point de vue idéologique, le démenti massif d’une telle attaque par d’autres Anonymous ne devrait pas tarder. Pour un mouvement qui a su gagner ses lettres de noblesse en soutenant les révolutions arabes et la diffusions de dossiers Wikileaks sur les dérives irakiennes, il parait difficilement concevable de les imaginer vouloir mettre à mal leur propres canaux de communication.
Par ailleurs les Anonymous ont réfuté vouloir attaquer le réseau électrique américain dans les prochaines années tel que le prétendait Keith Alexander, le chef de l’agence nationale de sécurité (NSA) au Wall Street Journal. Une inquiétude qu’il est aller jusqu’à formuler auprès de la Maison Blanche. Or ce discours anxiogène est ferment démenti par les Anonymous qui posent la question aux internautes, notamment sur Twitter, de l’opportunité d’une telle panne alors que de nombreux services vitaux en dépendent.
L’énormité d’une telle préoccupation formulée par un organisme gouvernemental laisse à penser pour de nombreux observateurs qu’il s’agit d’une manœuvre destinée à légitimer un durcissement de la répression contre l’hacktivisme. Le débat reste ouvert concernant les formes à donner au militantisme de masse sur Internet. De cette masse d’initiatives, les contours du mouvement Anonymous ne devraient jamais pouvoir être clairement délimitées puisqu’il prend corps et justification dans cette pluralité de formes d’indignations aussi nombreuses qu’insaisissables.
Why would Anons shut off a power grid? There are ppl on life support / other vital services that rely on it. Try again NSA. #FearMongering
— Anonymous (@YourAnonNews) Février 21, 2012