Grèce : à la tête d’un Etat “en faillite”, les dirigeants sollicitent la BCE
Les dirigeants de la Grèce Alexis Tspiras et Yanis Varoufakis poursuivent leur tournée en Europe.
Depuis le début de la semaine, le nouveau Premier ministre de la Grèce Alexis Tspiras et son nouveau ministre des Finances Yanis Varoufakis ont entamé une tournée des grandes puissances de l’Union Européenne. Après la France et le Royaume-Uni c’était le tour de l’Italie et l’Allemagne hier. Aujourd’hui, les 2 dirigeants grecques avaient rendez-vous à Bruxelles pour rencontrer le président de la Commission et à Franfort pour voir le dirigeant de la Banque centrale européenne.
Yanis Varoufakis a demandé au grand patron de la BCE de quoi “garder la tête hors de l’eau“, tandis qu’à Bruxelles Alexis Tspiras voulait croire en “une solution viable” pour son pays.
“Je suis très optimiste quant au fait que nous allons faire de notre mieux pour trouver une solution commune viable pour notre futur“, a déclaré à l’issue d’entretiens avec les présidents des trois institutions de l’UE (Commission européenne, Conseil et Parlement européen) le nouveau Premier ministre grec.
Le grand argentier grec a pour sa part passé un peu plus d’une heure au siège de la BCE dans la capitale financière allemande dans la matinée. A la sortie, il a déclaré avoir eu “des discussions fructueuses” avec le président de la BCE Mario Draghi, sources de “vif encouragement pour l’avenir“.
Yanis Varoufakis : “ministre des Finances d’un Etat en faillite“
La banque centrale joue un rôle pivot dans la course contre la montre de l’Etat grec avec le défaut financier. “La BCE doit soutenir nos banques pour que nous puissions garder la tête hors de l’eau“, a enjoint M. Varoufakis dans un entretien à l’hebdomadaire allemand Die Zeit, publié mercredi, où il reconnaît être “ministre des Finances d’un Etat en faillite“.
Les banques grecques sont les principales acheteuses des obligations grecques, par lesquelles le pays se finance à court terme. Et c’est essentiellement la BCE, par le biais de deux mécanismes de prêts – l’un “ordinaire“, conditionné au programme international d’aide dont bénéfice Athènes, et un autre d’urgence – qui alimente les banques grecques en liquidités. Le conseil des gouverneurs de l’institution pourrait choisir de ne pas renouveler mercredi le mécanisme d’urgence, ce qui serait très problématique.
Athènes, qui a levé avec succès mercredi un peu plus de 800 millions d’euros d’obligations à court terme, réclame “un financement intermédiaire” jusqu’au 1er juin, a dit M. Varoufakis à Die Zeit, date à laquelle il espère s’être entendu avec ses partenaires européens sur le devenir de la dette et une éventuelle nouvelle aide – dont Athènes estime pour le moment ne pas avoir besoin. Le programme en cours arrive à échéance à la fin du mois.
Objectif : convaincre la zone euro
Mais M. Varoufakis a reconnu au sortir de l’entretien avoir évoqué avec M. Draghi “les contraintes, les règles, les régulations et le processus” selon lesquels la BCE accorde ses aides, sous-entendant que le président de la BCE était peu enclin à outrepasser les règles très strictes qui encadrent son soutien des banques grecques.
MM. Tsipras et Varoufakis cherchent à convaincre la zone euro de la nécessité d’alléger le fardeau de la dette grecque et de réorienter la politique économique de l’Europe. Ils étaient à Rome mardi, dans le cadre de la tournée d’auto-promotion qui a déjà mené M. Varoufakis à Paris et à Londres. M. Tsipras rencontrera le président François Hollande à Paris dans l’après-midi.
M. Varoufakis pour sa part est attendu à Berlin jeudi matin, pour une entrevue avec son homologue allemand Wolfgang Schäuble. Il s’est dit “extrêmement impatient” de ce premier contact bilatéral, tout en appelant dans Die Zeit les Allemands, ardents défendeurs de la rigueur budgétaire honnie par la nouvelle équipe aux manettes à Athènes, à “écouter ce que (les Grecs) avaient à dire“.
Dans un entretien à l’hebdomadaire Stern, le vice-chancelier du gouvernement d’Angela Merkel, le social-démocrate Sigmar Gabriel, s’est inscrit en faux contre l’image d’une Grèce “victime” de ses partenaires européens. Mais “notre message à l’encontre de la Grèce a trop longtemps été: +économisez!+“, a-t-il reconnu, rejoignant le président du Conseil italien Matteo Renzi, hôte des Grecs la veille.
M. Varoufakis, qui peut se targuer du soutien du président américain Barack Obama, a promis de mettre sur la table la semaine prochaine ses propositions concrètes, lors d’une réunion des ministres des Finances de la zone euro, l’Eurogroupe, qui devrait se tenir le 11 février.
Une proposition est déjà dans le domaine publique, qui verrait Athènes échanger une partie de sa dette en circulation contre des obligations indexées sur le taux de croissance de l’économie grecque. Les Européens n’y ont pas vraiment réagi pour le moment.